Créé en 1949 par Jean Bruce, le personnage de Hubert Bonisseur de la Bath, agent de la CIA d’origine française, a tout d’abord pris à l’écran les traits de Ivan Desny dans « O.S.S. 117 n'est pas mort » de Jean Sacha (1957). Puis, Michel Piccoli l’incarna dans « Le Bal des Espions » de Michel Clément (1960), mais son nom (sans doute pour des raisons de droits) fut transformé en Bryan Cannon. Ces films n’ont pas marqué les esprist de l’époque et il faudra attendre André Hunebelle pour que cela change…
« OSS 117 se déchaîne » (1963)1963 marque la mort et la résurrection de OSS 117. Son créateur disparaît dans un accident de la route (après avoir écrit « OSS 117 à Mexico »), tandis qu’au cinéma, André Hunebelle lance la série de films à succès inspirés de ses aventures. Selon Mylène Demongeot, c’est Jean Marais qui «
avait déniché les OSS 117 de Jean Bruce et avait suggéré à André Hunebelle de les adapter au cinéma avec lui-même en vedette. » L’idée enthousiasme le cinéaste, qui avait beaucoup apprécié « O.S.S. 117 n’est pas mort ». Il apprend de Jean Sacha que les droits des romans sont libres et que Jean Bruce souhaite revoir son héros à l’écran. En coproduction avec l’Italie, il met en chantier une adaptation de « OSS 117 prend le maquis », intitulée « OSS 117 se déchaîne », mais… sans Jean Marais. Sans doute pour faciliter les ventes du film à l’étranger, Hunebelle lui préfère un acteur américain, Kervin Mathews. Mécontent et déçu, Marais se voit offrir en guise de compensation le double rôle de Fantômas-Fandor (destiné à l’origine à Raymond Pellegrin, qui dut se contenter de prêter sa voix au célèbre criminel !). Mathews est un habitué des rôles de héros (« Le Septième Voyage de Sinbad », « Les Voyages de Gulliver ») et a le physique idéal pour incarner OSS 117. Il en fera un charmeur, à la fois détaché et déterminé.
« OSS 117 se déchaîne » comporte de très bonnes scènes d’action, qui sont les premières du genre. André Hunebelle a en effet introduit les arts martiaux dans le cinéma français, alors habitué aux « bourre-pifs » administrés par Eddie Constantine et Lino Ventura. Les bagarres se font plus subtiles, plus vicieuses aussi, avec des coups fatals portés à la gorge ou aux tempes. Claude Carliez règle les combats (comme il le fait sur la majorité des productions de l’époque, qu’il s’agisse de luttes au corps ou de duels à l’épée). Le cascadeur Yvan Chiffre, qui est un de ses assistants (et qui joue dans le film un agent secret français), apprend le karaté et le kendo «
chez Cocatre, à la République, un des rares maîtres de karaté à Paris, et sans doute un des meilleurs ». S’il est souvent doublé, Kerwin Mathews ne s’en tire pas mal dans certaines séquences, notamment une l’opposant à Marc Mazzacurati.
Les scènes de bagarre sous-marines préfigurent celles de James Bond et ont été réalisées par Alain Boisnard, qui a officié de la même façon sur « Tintin et le Mystère de la Toison d’Or » de Jean-Jacques Vierne, avant de devenir le conseiller technique maritime d’André Hunebelle pour la séquence finale de « Fantômas ». Tourné à Bonifacio et à Nice, « OSS 117 se déchaîne » ne bénéficie pas de gros moyens. Le noir et blanc ne rend pas non plus l’enquête d’Hubert très excitante visuellement, mais le film est quasi-expérimental, car le succès d’une telle aventure n’est pas encore assuré. Il sort en France la même année que « Coplan prend des risques » de Maurice Labro (le premier des cinq films adaptés de Paul Kenny) et surtout « James Bond contre Dr No » de Terence Young. La grande mode de l’« espionnite » était lancée.
« Banco à Bangkok pour OSS 117 » (1964)
Pour la deuxième aventure de OSS 117, les producteurs revoient le budget à la hausse : pellicule couleur, tournage en extérieurs (en Thaïlande), décors imposants (construits par René Moulaert aux studios de Boulogne), vedettes (Robert Hossein, Dominique Wilms). C’est finalement dans « Banco à Bangkok pour OSS 117 » qu’Hubert Bonisseur de la Bath se déchaîne ! Inspiré de « Lila de Calcutta », le film lance l’agent de la CIA sur les traces d’une mystérieuse organisation, dirigée par le Dr Sinn («
Le rôle était génial ! », se souvient Robert Hossein), spécialiste des maladies psychiatriques et « chouchou » de la jet set de Bangkok. Celui-ci se prépare à répandre le virus de la peste à travers le monde.
Son discours apocalyptique devant ses fidèles est mémorable : «
L’heure est venue où, pour la dignité de l’Homme, des millions d’hommes doivent périr. Des nations peu évoluées, aux philosophies primaires, risquent à tout moment par leurs criminelles expériences atomiques de provoquer la désagrégation de notre planète. Notre devoir est de les détruire, pour que demeure seule la spiritualité d’une civilisation millénaire. Alors, et alors seulement, nous aurons atteint notre but. La victoire de ceux qui ont le courage de cesser d’être humain pour que triomphe la cause de la race élue. »
Il semble évident que les auteurs avaient en tête « James Bond contre Dr No » en écrivant l’histoire. L’enchaînement des premières scènes rappelle en effet beaucoup le film de Terence Young : l’élimination d’un agent, la présence d’un photographe à l’aéroport, la secrétaire qui écoute aux portes, l’homme de main qui choisit de se tuer pour ne pas parler… Parmi les scénaristes de « Banco à Bangkok pour OSS 117 » se trouve Richard Caron, auteur de nombreux romans d’espionnage (parus notamment aux Presses de la Cité dans la collection « Jean Bruce ») et créateur du héros TTX 75.
Il est agréable de retrouver Dominique Wilms, qui avait « vampé » Lemmy Caution dans « La Môme Vert-de-gris » de Bernard Borderie, dix ans auparavant. Robert Hossein, qui tourne la même année « Angélique, Marquise des Anges », reviendra dans « Pas de roses pour OSS 117 » en 1968. Quant à Henri Virlogeux, qui joue ici le contact d’Hubert à Bangkok, il prêtera sa voix à Colin Drake dans « Atout Cœur à Tokyo pour OSS 117 ». Signalons enfin la figuration de Michel Magne, qui danse au Golden Dragon.
« Furia à Bahia pour OSS 117 » (1965)
Après « Banco à Bangkok pour OSS 117 », André Hunebelle crée la franchise « Fantômas », qui va vite elle aussi loucher du côté de James Bond, mais également de OSS 117. Le titre du deuxième film, « Fantômas se déchaîne » reprend celui du premier Kerwin Mathews, tandis que le canon à ondes télépathiques s’inspire de la machine du Dr Sinn de « Banco à Bangkok… ». Pour « Furia à Bahia pour OSS 117 », Hunebelle va également utiliser deux des principaux comédiens de son autre série : Mylène Demongeot (Hélène, la compagne de Fandor) et Raymond Pellegrin (la voix de Fantômas).
Pour la nouvelle mission du héros de Jean Bruce, un problème de casting se pose. Les exigences financières de Kerwin Mathews sont trop élevées et il est décidé de le remplacer. Le choix ne se porte pas sur l’un des nombreux acteurs américains venus tenter leur chance à Paris ou à Rome (Ken Clark, Richard Harrison, Sean Flynn, Lex Barker, Ray Danton, George Nader…) mais sur un inconnu, qui plus est autrichien et sans expérience de la comédie. Son nom : Frederick Stafford. Jean-Pierre Desagnat, qui fut assistant-réalisateur sur plusieurs films d’André Hunebelle et qui réalisera « Pas de Roses Pour OSS 117 », se souvient de lui : « A l’origine, Stafford n’était pas acteur. De son vrai nom Frederich Strobl von Stein, ce noble autrichien était représentant en produits pharmaceutiques et était marié à l’actrice Marianne Hold, connue pour son interprétation de « Marianne de ma Jeunesse » de Julien Duvivier. Elle tournait alors à Bangkok et Frederick l’accompagnait. Sigmund Graa, le secrétaire d’Hunebelle, fit sa connaissance et de retour à Paris, proposa des essais au cinéaste, qui avait apprécié sa grande silhouette sportive ».
Autrichien né le 11 mars 1928 en Tchécoslovaquie, Stafford vécut longtemps en Australie, avant de revenir s’installer en Europe. Très athlétique, il participe aux compétitions de hockey sur glace à Davos en 1947 et aux épreuves de natation aux Jeux Olympiques de 1948. Une fois choisi pour interpréter Hubert Bonisseur de la Bath, il suit des cours de français, de diction, de judo et de karaté. « Ce n’est pas du tout un acteur », constate Mylène Demongeot. « Il est raide comme une potiche, mais c’est un bel homme, très grand et très gentil. » Malgré son handicap de départ, Frederick Stafford va très bien s’en sortir, aidé par un physique avantageux et une aisance évidente dans les scènes d’action.
En prenant pour base le roman « Dernier Quart d’Heure », André Hunebelle, son fils Jean Halain, et Pierre Foucaud envoient Hubert Bonisseur de la Bath au Brésil, pour démanteler un réseau terroriste responsable d’attentats sanglants contre d’importantes personnalités sud-américaines. Après avoir échappé à plusieurs pièges, il met en échec les plans d’un néo-nazi (François Maistre, apparu dans « Le Bal des Espions »), qui veut dominer le monde grâce à des tueurs téléguidés.
Comme sur le film précédent, les tournages des extérieurs sont assurés par Jacques Besnard. Il avait débuté comme assistant-réalisateur sur « OSS 117 se déchaîne » avant de devenir réalisateur de seconde équipe sur les deux premiers « Fantômas ». Il deviendra cinéaste, dirigeant notamment Frederick Stafford dans « Estouffade à la Caraïbe » en 1967 (une production André Hunebelle).
Dans le dossier de presse du film suivant, on pouvait lire : « Quand les lumières s’allumèrent à nouveau après la première projection de « Furia à Bahia pour OSS 117 » au cinéma Normandie, Paris comptait une vedette de plus. Frederick Stafford venait d’être projeté au firmament des stars grâce à André Hunebelle. » Auréolé de ce succès, l’acteur débutant devenu célèbre du jour au lendemain s’envole pour le Liban pour y tourner un film au titre plus que révélateur, « Baroud à Beyrouth par FBI 505 » de Manfred Köhler. Un film aujourd’hui complètement oublié…
« Atout Cœur à Tokyo pour OSS 117 » (1966)
OSS 117 a désormais d’innombrables concurrents. La France et l’Italie se sont mises à produire des films d’espionnage par centaines : « Bob Fleming, Mission Casablanca », « Karaté à Tanger pour agent Z7 », « Baraka sur X-13 », « Coplan FX-18 casse tout », etc. Jean Marais lui-même, sans doute frustré de n’avoir pas obtenu le rôle d’Hubert Bonisseur de la Bath, se transforme en espion dans « L’Honorable Stanislas, Agent Secret », « Pleins Feux sur Stanislas » et « Train d’Enfer ».
Mais le « patron » dans ce domaine reste toujours James Bond. André Hunebelle a alors l’idée de faire appel à Terence Young pour coécrire avec Pierre Foucaud l’adaptation de « Atout Cœur à Tokyo » (n°47). Considéré comme le père cinématographique de 007, cet Anglais francophile a réalisé « James Bond contre Dr No » (1962), « Bons Baisers de Russie » (1963) et « Opération Tonnerre » (1965). Seulement voilà, malgré son nom au générique, il semble que la nature de son apport reste un mystère. Certains des membres de l’équipe, quand on leur pose la question aujourd’hui, sont même étonnés d’apprendre sa participation au film. S’il est crédité comme adaptateur à la SACD (Société des Auteurs Compositeurs Dramatiques), Terence Young n’a toutefois perçu aucune rétribution (le Centre National du Cinéma ne possède en effet pas de contrat à son nom). Pour Vincent Chenille (de « Archives 007 »), cependant, « une scène possède vraiment la touche Young, celle où OSS tente d’étrangler un méchant avec le fil du téléphone. Le méchant se défend et Hubert tire le fil, projetant l’ennemi par la fenêtre, et le voici « pendu au téléphone ». Bien qu’il reproche à Bond son sadisme, Young adore l’humour noir. »
Même s’il n’était pas nécessaire de s’adjoindre les services de Young pour cela, le scénario (assez éloigné du roman) offre beaucoup de similitudes avec « Opération Tonnerre ». L’organisation qui fait chanter les Etats-Unis en menaçant de détruire des bases militaires n’est pas sans rappeler l’opération menée par le SPECTRE contre l’Otan. Et un des personnages se nomme Vargas, comme l’homme de main d’Emilio Largo. On remarque aussi que « Atout Cœur à Tokyo pour OSS 117 » donnera des idées au James Bond suivant, « On ne vit que deux fois », qui sortira en 1967 : la scène du massage, la collaboration avec une espionne japonaise (que l’on prend d’abord pour un agent ennemi) ou encore l’association d’une organisation criminelle avec un groupe industriel.
Occupé par la préparation du film « Sous le signe de Monte Cristo » (une adaptation moderne du roman d’Alexandre Dumas), André Hunebelle n’assure pas la réalisation, qui est confiée à Michel Boisrond, jusqu’alors plutôt spécialisé dans les comédies. Est-ce grâce à sa direction d’acteur, toujours est-il que devant sa caméra, Frederick Stafford est de plus en plus convaincant. Tour à tour décontracté, violent et calculateur, il donne à OSS 117 sa meilleure interprétation, tous films confondus. Il excelle dans les scènes de combat, extrêmement spectaculaires. Face à lui, Marina Vlady (qui vient de tourner avec Roger Vadim et Orson Welles) est parfaite en femme manipulée, menant double jeu aux yeux de la CIA. Henri Serre apporte toute son austérité et son élégance au personnage trouble de John Wilson (il aura un rôle proche dans « Fantômas contre Scotland Yard »). Et Jacques Legras intervient là où on ne l’attend pas, en tueur japonais !
On remarquera la qualité des décors de Max Douy. Sur les « Fantômas », André Hunebelle lui avait demandé de faire de la « science-fiction à la bonne franquette ». L’ambiance est évidemment différente sur « Atout Cœur à Tokyo pour OSS 117 » mais le décor de l’intérieur du cargo, d’où partent les mini-fusées, n’est pas sans rappeler celui de « Fantômas se déchaîne » où les scientifiques sont retenus prisonniers.
A noter enfin que Claude Sautet participa lui aussi au scénario sans être crédité.
« Pas de Roses pour OSS 117 » (1968)
Le nouvel OSS 117 sort presque deux ans après le précédent. Entre temps, Hunebelle a réalisé « Fantômas contre Scotland Yard », qui clôture la série. « Sur le plateau, on sentait qu’une époque du cinéma français se terminait », se souvient Michel Wyn, alors réalisateur de seconde équipe. « Hunebelle avait soixante-dix ans. Avec les techniciens, notre plaisanterie préférée était : « Qui est donc ce vieux monsieur à chapeau qui nous suit partout ? » (rires) La télévision changeait la donne, le cinéma de genre à l’ancienne se délitait ». La chose se vérifie sur « Coplan sauve sa peau » réalisé par le jeune Yves Boisset. Profitant de l’absence des producteurs sur le tournage (en Turquie), il transforme une banale histoire d’espionnage en film fantastique inspiré de la « Chasse du Comte Zaroff » !
S’il est moins subversif, « Pas de Roses pour OSS 117 » est cependant lui aussi réalisé par un jeune cinéaste, Jean-Pierre Desagnat. Le générique affirme cependant que le film est signé Hunebelle ! Ce mensonge est dû aux distributeurs qui, pour des raisons commerciales, ont préféré ne pas inquiéter le public par un changement de direction. Assistant-réalisateur sur les « Fantômas » et « Atout Cœur à Tokyo pour OSS 117 », Desagnat s’est vu proposer par Hunebelle de mettre en scène « Les Etrangers » écrit par Pascal Jardin. Pendant la préparation de ce film policier, le projet « OSS 117 » s’est présenté et Desagnat en a accepté la réalisation.
Autre inexactitude du générique : le film serait l’adaptation par Michel Levine et Pierre Foucaud du roman de Josette Bruce « Pas de Roses à Ispahan pour OSS 117 ». La réalité est tout autre. Jean-Pierre Desagnat et Pascal Jardin écrivent un premier scénario original, qui déplaît au coproducteur italien Marcello Danon, par son côté « comédie ». Vient ensuite le tour de Michel Lebrun. Surnommé le « Pape du Polar », ce romancier est également scénariste et a même travaillé sur « Banco à Bangkok pour OSS 117 » et « Furia à Bahia pour OSS 117 » (sans être mentionné au générique). Son adaptation n’est qu’une première étape. Desagnat collabore ensuite avec Michel Levine, tandis que Claude Sautet est consulté. Plusieurs discussions s’engagent finalement avec Pierre Foucaud et surtout André Hunebelle.
« L’écriture avec Hunebelle était une activité passionnante, se souvient Jean-Pierre Desagnat. Il avait gardé une âme d’enfant (dans le bon sens du terme) et une naïveté sur l’existence, malgré ses soixante-douze printemps à cette époque. Ouvert à toutes suggestions, il avait une vision positive des images et des situations. C’était un réel plaisir que de travailler à ses côtés. »
Le scénario est enfin accepté et donne une histoire assez délirante, où OSS 117, pour lutter contre une organisation responsable de plusieurs meurtres politiques, se fait recruter par le chef, surnommé « Le Major », après avoir subi une opération chirurgicale lui donnant le visage d’un célèbre assassin (une idée inspirée du roman « OSS 117 n’était pas mort » n°22). Josette Bruce s’inspirera du scénario pour signer « Pas de Roses à Ispahan pour OSS 117 », publié en 1967 (avant même la sortie du film).
Depuis son deuxième « OSS 117 », Frederick Stafford ne s’arrête pas de tourner. Il a retrouvé Michel Boisrond pour « L’Homme qui valait des milliards », et donné la réplique à Jean Seberg dans « Estouffade à la Caraïbe » et à Daniela Bianchi dans « La Gloire des Canailles ». Il ne se retrouve donc pas sans emploi lorsqu’André Hunebelle décide de le remplacer. Le cinéaste-producteur a en effet en tête de trouver un acteur susceptible de toucher le public nord-américain. Son choix se porte sur John Gavin. De son vrai nom Jack Anthony Golenor, il a à son actif quelques grands films comme « Le Temps d’aimer et le temps de mourir » (1958), « Spartacus » (1960) ou « Psychose » (1960). Il est le premier OSS 117 à parler avec un accent américain. « Le nouvel OSS, John Gavin, est pour une fois tout à fait crédible », écrit Claude-Marie Trémois dans « Télérama ». « Séduisant, l’air d’être capable de penser (c’est rare), et non moins capable de se servir de ses poings. » On peut cependant regretter qu’il soit beaucoup moins sophistiqué que ses prédécesseurs, qui étaient plus fins, plus anglais, plus « bondiens ». Cela n’empêchera pas Gavin d’obtenir deux ans plus tard… le rôle de James Bond dans « Les diamants sont éternels » ! Le producteur Albert Broccoli voit en lui l’interprète idéal : « grand, athlétique et très bon acteur ». Malheureusement, la United Artists parvient à convaincre Sean Connery de rendosser le smoking une dernière fois et Gavin est remercié (non sans avoir touché intégralement son cachet).
Le tournage initialement prévu en Iran, se déroule en fin de compte en Tunisie et à Rome. Quatre ans après « Banco à Bangkok pour OSS 117 », Robert Hossein retrouve un personnage de médecin pour le moins peu recommandable. 1968 marque également pour lui la fin de la série des « Angélique ». Curd Jurgens (« L’espion qui m’aimait ») interprète le « Major ». Luciana Paluzzi (« Opération Tonnerre ») et Margaret Lee (« Fureur sur le Bosphore », « Le Tigre se parfume à la Dynamite », « Coplan sauve sa peau »...) assurent le cota de charme.
L’absence de participation de l’équipe habituelle (Michel Magne, Max Douy, Claude Carliez, etc.) et l’atmosphère réaliste du film (tant au niveau de l’image que des décors) placent un peu « Pas de Roses pour OSS 117 » en marge de la série. Il rencontre un succès moyen en France et n’est pas distribué outre-Atlantique, malgré la présence de John Gavin. André Hunebelle comprend que la vague de l’espionnage touche à sa fin et qu’il est temps de passer à autre chose.
(texte écrit à l’origine (et remanié depuis pour le blog) pour un livre sur OSS 117 devant paraître chez DLM en 1996 et finalement inséré dans le coffret DVD édité par Gaumont en 2005)
[sources : témoignage de Jean-Pierre Desagnat, « Archives 007 » n°3, « Télérama » n°969, « Robert Hossein, le Diable Boiteux » de Henry-Jean Servat (éd. du Rocher, 1991), « A l’Ombre des Stars » d’Yvan Chiffre (Denoël, 1992), « When the Snow Melts » de Cubby Broccoli et Donald Zec (Boxtree, Londres, 1998), « Tiroirs Secrets » de Mylène Demongeot (Le Pré aux Clercs, 2001), livret du CD « Fantômas » (Universal, 2001)]